Voler le feu – Anatomie de Transition #2

Note 4 étoiles

Spectacle de Jenny Charreton coproduit par Collectif Offense (Clémentine Lévêque) vu le 18/11/2025 au Théatre Garonne dans le cadre du Festival Supernova (festival jeunes créations) en partenariat avec le Sorano.

  • Autrice : Jenny Charreton
  • Texte : Luz Volckmann
  • Mise en scène : Jenny Charreton aidée de Maxime Grimardiassss et Noé Reboul
  • Comédiennes : Jenny Charreton et Daphné Demaison
  • Type de public : Adultes
  • Genre : Performance avec texte, musique et arts plastique
  • Durée : 1h30
  • Musique : Jenny Victoire
  • Co- création plastique, scénographie & accessoires : Mag Lévêque

 

Création proposée dans le cadre du Festival Supernova, qui a lieu à Toulouse chaque année en novembre. Cette année est la 10ième édition de ce festival dans lequel j’ai assisté à la représentation « Voler le feu », de la Compagnie Offense. La scène accueille une baignoire en son centre, deux établis sur les côtés où se construisent les créations qui sont projetées sur un grand écran au fond de la scène. Espace à l’avant de la scène pour permettre à une des artistes le modelage de sculptures en argile.
Comme cette édition le suggère, ici je découvre une représentation audacieuse, engagée et flamboyante.

Ce conte, performé à quatre mains par deux artistes, offre une dénonciation puissante et d’une grande sensibilité de la transmisogynie. En mêlant vidéo, arts plastiques (collage, terre, marionnettes, modelage), musique et voix off traduites en Langue Des Signes, elles composent un univers hybride où chaque média vient donner corps à des vécus transféminins représentés avec beaucoup de justesse.
Le récit, présenté comme l’histoire d’une princesse, s’éloigne volontairement des codes classiques. Dès l’ouverture – « Il était une fois une princesse dans son jus. Pour devenir princesse elle avait volé sa couronne. Pour punition, son cœur fut maudit, son avenir était interdit. Elle se baignait dans son fiel » – le ton est donné : un conte détourné, où les images et compositions dialoguent avec un château de cire aux formes phalliques, qui fond lentement derrière le texte.
La dimension politique du sujet, profondément ancrée dans la critique de la transmisogynie, est abordée avec une poésie visuelle étonnante : un imaginaire d’enfance revisité, des mots incisifs sculptés dans la douceur de l’argile – « La terre est comme moi, elle germe des mots sans parole. Ce que mon cœur ne sait mon argile me le dit ».
Les images, les assemblages, les mots oscillent entre douceur et rugosité, entre fragilité et force brute. L’ensemble traduit avec finesse la difficulté à se projeter dans un monde incertain, marqué par la précarité et la désillusion. Malgré la gravité des thèmes, la performance reste d’une subtilité remarquable, profondément émouvante, et par moments traversée d’un humour qui fait résonner de nombreux rires dans une salle comble, en majorité composée de jeunes adultes.
C’est une œuvre subtile, belle, inventive, investie, touchante (et glissante)…déroutante, qui marque durablement.

 

Sophie Culioli

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