Un spectacle produit par la compagnie La Tempête (19 et 95) et vu au Théâtre de l’Athénée le 23 mai 2025.
- Mise en scène, direction musicale et arrangements : Simon-Pierre Bestion
- Musiciens : Mario-Barrante Espinoza (danseur et ténor), Guy-Loup Boisneau (Ténor et percussions), Héléna Bregar (Soprano et guitare renaissance), Fanny Châtelain (contrealto, flûtes), Noé Clerc (accordéon et chant), Julie Dessaint (viole de gambe, guitare, chant), Frabrice Foison (ténor et saxo) Jawa Manla (mezzo-Soprano et oud), Xavier Marquis (basson baroque, clarinette, duduk et chant), Matteo Pastorinon (clarinette basse et chant), René Ramos-Premier (baryton), Lilas Reglat (contrebasse, viole de gambe et chant), Mathilde Rossignol (mezzo-soprano et violon)
- Dramaturgie : Raphaëlle Blin
- Scénographie : Solène Fourt
- Costumes : Cécilia Galli
- Lumières : Laurent Matigon
- Genre : Théâtre musical
- Public : Tout public
- Durée : 1h35
Quelle mouche m’a piquée d’aller voir « Sibylle(s) » : la mythologie grecque dont je suis férue ; la perspective d’assister à un spectacle musical comme je les aime ? Quoiqu’il en soit, et sauf moments de grâce, j’aurais pu m’abstenir.
« Sibylle(s) » raconte en cinq tableaux la nécessité de revisiter les rituels passés, d’écouter l’intuition féminine des Sibylles et autres Pythies pour mieux affronter lucidement le présent et déconstruire le déterminisme du futur qu’on nous promet.
Treize musiciens nous emmènent sur ce chemin à travers un riche répertoire qui va des mélopées grecques d’Euripide à la musique contemporaine (Zad Moultaka, Aperghis et Xenakis) en passant par les chants de la Sibylle et « l’Orféo » de Monteverdi. Ce programme m’aurait ravie en lui-même. Le problème, c’est qu’il s’accompagne d’une mise en scène fourre-tout et prétentieuse qui n’a pas les moyens artistiques de ses ambitions.
Visuellement, le spectacle n’est pas dénué de belles images avec ces pupitres en forme de planches qui descendent des cintres et ces céramiques brutes qui évoquent la nomenclature grecque. Mais ces quelques images sont gâtées par une redondance d’effets (le rideau noir qui se lève pour laisser passer, en pleine lumière, la Sibylle tout de blanc vêtue par opposition à la tente noire qui représente la mort). Le narratif, parfois projeté sur les murs, paraphrase inutilement la musique ; Les accessoires et les déplacements frisent le ridicule comme cette malheureuse faucille sensée représenter la faux de la Mort. C’est assommant.
Musicalement, l’ensemble est très inégal. Ce que le rappel a prouvé c’est que la plupart des musiciens et chanteurs ne savent pas se déplacer et chanter en même temps. Du reste, ils sont musiciens ; ni comédiens, ni danseurs. Bref, il y a de la perte sur tous les registres. Cependant, trois d’entre eux sortent littéralement du lot : le baryton René Ramos-Premier, le clarinettiste basse et chanteur Mattéo Pastorino, la joueuse d’oud et chanteuse Jawa Manla. La présence du oud témoigne d’une interprétation qui laisse entendre dans le Monteverdi et les chants de la Sibylle l’influence arabo-andalouse. C’est tout à fait bien venu, tout comme certains arrangements. Et malgré le manque de coffre, les polyphonies chorales sont très agréablement chantées.
« Sibylle(s) » est un projet trop ambitieux. N’est pas Jeanne Candel, Benjamin Lazar, Florent Hubert et Samuel Achache qui veut. Je m’attendais à un spectacle de cette qualité. On est très loin du compte.
Catherine Wolff