Un spectacle produit par Kvs& Toneelhuis (Belgique) et vu au Théâtre de la ville le 12 juin 2025.
- Texte : Bertolt Brecht
- Mise en scène : Lisaboa Houbrechts
- Dramaturgie : Dina Dooreman, Erwin Jans
- Scénographie : Lisaboa Houbrechts et Ralf Nonn
- Musique originale : Paul Dessau
- Comédiens : Laetitia Dosch, Aydin Isleyen, Pietro Quadrino, Lisi Estaras, Laura de Geest, Koende Sutter, Joeri Happel, Alain Franco
- Interprétation musicale : Alain Franco et Aydin Isleyen
- Lumière : Fabiana Piccoli
- Genre : Théâtre
- Public : Adulte
- Durée : 2H
J’avais découvert l’an passé Lisaboa Houbrechts avec « Pépé chat ou comment dieu a disparu ». Suffisamment convaincue par la proposition, j’avais décidé de suivre son travail. Elle présente pour trois jours, au Théâtre de la Ville, dans le cadre du festival Chantiers d’Europe ,« Mère courage » et malgré mes réticences pour Brecht, j’ai tenu parole. Le spectacle a d’indéniables qualités visuelles, mais il m’en fallu, du courage, pour rester jusqu’au bout.
« Mère courage » raconte l’histoire d’une profiteuse de guerre malgré elle. Anna, alias Mère courage, vend pacotille et nourriture dans le sillage des armées. Elle traîne avec elle sa carriole et ses trois grands enfants, nés de pères différents, au gré de ses pérégrinations. Certes, la guerre les nourrit mais elle finira par tous les emporter à l’exception de la mère.
En ces temps troublés, le choix de Brecht et de ce plaidoyer pour la paix est une riche idée. Mais ça ne passe pas. Est-ce le texte qui a vieilli ? Est-ce la distanciation si chère à Brecht et admirablement reproduite par une absence totale d’émotion qui ne fonctionne plus ? Est-ce le passage d’une langue à l’autre (français, néerlandais, hébreu et kurde surtitrés) qui gêne l’appropriation de l’histoire ? Est-ce un jeu inégal, non exempt d’accrocs et écrasé par la technique, qui pèche ? Ce qui est sûr, c’est que la sonorisation, mal réglée, a largement desservi les huit comédiens. Il y a eu beaucoup de départs.
Le seul intérêt de la pièce, c’est sa scénographie, remarquable. Une grande sphère déambule avec les comédiens sur un plateau recouvert d’eau. En fond de scène, un cyclo découpe des lumières et des reflets admirables. La grande sphère représente littéralement la carriole. Métaphoriquement, ce peut être notre pauvre terre, un boulet de canon ou la traduction graphique de l’expression « porter le monde sur ses épaules ». Outre cette belle trouvaille, on peut relever le bruit de planches jetées dans l’eau et qui opère comme des détonations. Les quelques intermèdes musicaux –entre chants orientaux et flamenco accompagnés au saz- couronnent la magie du spectacle.
« Mère courage » est donc un spectacle duel : théâtralement raté ; visuellement sublime.
Catherine wolff