Discours d’un peuple

Note 4 étoiles

Spectacle de la compagnie La Bestiole (84) vu le 07/11/2025 à 19h au Théâtre Benoît XII (Avignon)

  • Ecriture/ Mise en scène : Jana Thomann
  • Comédiens : Velzi Shinza, Océane Philippon, Elia Rossa , Anaelle
  • Type de public : Adultes
  • Genre : Théâtre, sortie de résidence
  • Durée : 1h

 

Installé au premier rang, les minutes défilent avant que le spectacle commence. Les spectateurs prennent place au fur et à mesure, je reconnais quelqu’un dans la salle. Sur scène, un violon et un cercle blanc. Encore quelques instant et le noir prend place. Une présence arrive sur scène, je pense… et quand la lumière intervient, c’est en fait trois entités qui tournent dans ce cercle ; je ne connais pas encore leurs rôles.

J’ai ressenti dès les premiers instants de jeu que cette pièce allait me parler. Une émotion forte a été posée quand les trois comédiens ont pris place dans ce cercle puis ont tourné autour, en se tenant les uns les autres, à l’aide d’un tissu attaché à leur poignet gauche… dans une danse baignée par la musique, comme s’ils étaient prisonniers de leur propre humanité.

C’est quand un des acteurs s’est détaché du reste, dans un mouvement lent pour s’habiller de son costume, que l’histoire pouvait commencer.

Reflet de notre société à bout de souffle. Maître de sa vie et de ses choix, mais dont la liberté est conditionnée et maîtrisée par des entreprises privées , par ceux qui ont des « beaux papiers ».

Toi, l’homme du peuple, tu ne vois rien ou tu ne veux pas voir.

Prix au piège par des signatures et des contrats, deux habitants qui possèdent des terres sans avoir besoin d’argent (riche par leur culture, leur langage, leurs souvenirs) se retrouvent locataires et dépendants d’une structure extérieure, qui modifie petit à petit le paysage constitué de rivière, montagne et forêt. Tout est redessiné pour laisser place au vide. Bientôt la création d’un nouvel espace artificiel.

Alarme sur l’appauvrissement de la langue, du droit d’expression. De ce qui fait que la poésie peut naître. Mais elle peut aussi naître sans la langue, juste par la visualisation.

Une performance qui prend aux tripes. Entre moment musical et danse, dialogue et monologue mais pas de mot de trop. C’est aussi drôle. Pas du tout dramatique. Un théâtre de sens et de conscience. Sans oublier la délicatesse du geste et une lumière douce, qui invite à l’introspection.

Et franchement, oui, cette thématique amène à réfléchir : nous citadins ou villageois, hommes et femmes de ce monde, à qui cédons-nous nos droits ? A quel prix, et combien de temps et de blessures ?

Dans le silence de la nature et de la vie, avec ces propres richesses et talents, le bruit et son rythme effréné coupent le courant et le flux continue.

 

Yann Stöhr

 

Partager votre chronique sur les réseaux sociaux et gagner de la visibilité !

Facebook
Twitter
LinkedIn
Email