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Débrayage

Note 2 étoiles

Spectacle de la Compagnie de l’Astrolabe (34) vu au théâtre de l’Adresse (84) le 6 juin 2025, dans le cadre du Festival Aptérygogène (rencontres théâtrales amateur et professionnel).

  • Texte : D’après Rémi de Vos
  • Mise en scène : Fred Tournaire
  • Acteurs : Guylaine Feuillassier, Pascal Dalzor, Cédric Paoletti, Pilippe Larricq, Violaine Marsy, Romain Cheftel, Belka Soufi
  • Type de public : Tout public
  • Genre : Théâtre amateur

 

Le théâtre de l’Adresse est situé à 500 mètres au bout de ma rue, et je ne le connaissais pas. Je pénètre dans une petite cour accueillante, aux arbres centenaires. Un avant-goût de théâtre bien agréable, dans la fraîcheur d’un soir de printemps, un mois avant le grand festival d’Avignon, et son lot de chaleur étouffante de plein été.

 

Le théâtre propose un mini festival, au nom imprononçable, APTERYGOGENES, qui mêle amateurs et professionnels. Pas moins de 8 pièces sont programmées du 8 au 15 juin. Ou plutôt des adaptations de pièces de théâtre, car en fait, il s’agit de la présentation de travaux d’élèves des deux ateliers animés à l’année par le metteur en scène et directeur du lieu, Fred Tournaire. Chaque pièce est jouée de 3 à 6 fois sur les quinze jours. Cette mise en situation de spectacles est une vraie bonne idée. Les élèves/acteurs peuvent ainsi expérimenter véritablement ce que veut dire jouer plusieurs fois la même pièce(ou plusieurs pièces, car certains s’investissent dans plusieurs spectacle) et ressentir ce qui fait la permanence et la variabilité du jeu chaque soir devant un public différent.

J’assiste donc à la première représentation de « Débrayage ». Sur scène, un dispositif tout simple et bien utilisé, de grands panneaux sur roulettes, couleur beige terne, comme il se doit pour illustrer le thème du travail. Ils vont s’articuler différemment en fonction des besoins des scènes qui se déroulent sous nos yeux et devenir un couloir de bureau, un mur d’offre d’emplois pour que la France Travaille, une salle d’attente où il ne se passe rien, ou presque, un bureau de DRH pour un double entretien d’embauche pernicieux, une barricade de manif où l’on discourt sur la mort de Marx. Écrite en 1994, malgré une légère odeur de naphtaline, la pièce garde tout son potentiel satirique des enjeux de pouvoirs hiérarchiques, des alliances sournoises entre collègues, et de l’absurdité des démarches infligés aux personnes en situation de demande d’emploi ou aux travailleurs eux-mêmes.

Devant la succession des saynètes, l’idée me vient que dans ce contexte de sortie d’atelier, le texte ici est quand même d’avantage un prétexte à jeu d’acteurs. Le texte est en quelque sorte « tiré », et sans doute aussi modifié, pour faire valoir les capacités des acteurs sur scène et leur donner l’opportunité d’en jouer. D’où sans doute une tendance un peu poussée à la caricature que j’ai pu ressentir par moment, au détriment d’une dramaturgie d’ensemble. Mais ça marche ! Les acteurs et leurs potentialités sont bien mis en valeur. Il y a celle qui a une belle voix qui fait autorité, qui parle vite et bien, belle performance de diction d’ailleurs ; celui qui fait le clown, mais s’avère trouble comme un cul de basse fosse ; il y a la jeune femme dynamique tendue par une colère contenue et l’éternel insatisfait ; le décalé et le gars qui observe en silence. Chacun a eu son beau moment d’acteur sous la lumière des projecteurs. Je retiens particulièrement une belle complicité des uns et des autres sur le plateau, et ça c’est vraiment prometteur !

La pièce termine par ce joli moment sur la lutte des classes, réfléchi, sensible, très juste dans notre monde actuel prétendument dépolitisé. Un public amical et bien fourni a applaudi chaleureusement la performance.

 

Madeleine Esther

 

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