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Celle que vous croyez

Note 3 étoiles

Spectacle de la compagnie Les Asphodèles du Colibri (69) vu le 17/06/2025 au Théâtre Arthéphile (84) à 19h (avant-première du festival Off d’Avignon)

  • D’après le roman de Camille LAURENS (Editions Gallimard)
  • Adaptation, mise en scène : Albane LAQUET
  • Comédiens : Karin MARTIN-PRÉVEL & Michaël MAINO
  • Art numérique : Yannick MORÉTEAU
  • Création lumières : Isabelle PICARD
  • Création vidéos : Catherine DEMEURE
  • Scénographie : Line de CARNÉ
  • Genre : Théâtre contemporain
  • Type de public : Tout public à partir de 12 ans
  • Durée : 1h30

 

Lors de cette représentation, Camille Laurens, écrivaine du roman dont est tirée cette pièce, était avec nous. À la fin du spectacle, nous avons eu un bord plateau avec elle, les deux comédiens et la metteuse en scène.

Comment en est-on arrivé là ? C’est la question que pose Claire au tout début du spectacle. Claire Millecam, 48 ans, divorcée, a un petit ami, Jo. Comme sa relation avec lui devient difficile, elle décide d’enquêter sur lui. Pour cela, elle crée un faux profil Facebook et devient Claire Antunès, une jeune femme brune de 24 ans. Son objectif : entrer en contact avec Chris, l’ami de Jo, et ainsi glaner des informations. De fil en aiguille, la relation épistolaire avec Chris se transforme en passion amoureuse virtuelle, puis en obsession. Le fil du spectacle nous dévoile peu à peu le cheminement intérieur de Claire… jusqu’à l’hôpital psychiatrique.

Tirée du roman éponyme de Camille Laurens, la pièce mise en scène par Albane Laquet ne restitue pas l’intégralité de l’œuvre, mais s’empare d’une des histoires du livre, qui en contient plusieurs, subtilement entremêlées.

Dans un décor volontairement dépouillé, avec juste une méridienne, Karin Martin-Prével incarne une Claire bouleversante, enfermée dans sa solitude et dans les méandres de son propre récit. Avec pour seul partenaire un smartphone, elle parvient à rendre palpable l’intériorité de son personnage : ses fragilités, ses emballements, ses contradictions. Une vraie prouesse d’actrice, tant elle porte la pièce à bout de bras.

Les messages échangés sur Facebook apparaissent en direct sur un rideau ajouré tombant devant la scène, créant une distance visuelle et émotionnelle : celle de l’écran, celle de l’illusion. Cette barrière numérique devient aussi une métaphore de l’enfermement mental, accentuée par la sobriété de la scénographie. Quelques projections en arrière-plan viennent en illustration du récit.

La pièce questionne notre rapport au virtuel, au double numérique que nous nous créons — parfois pour fuir, parfois pour exister. Elle interroge aussi notre lien au réel, à l’imaginaire, à cette zone trouble où les identités se fabriquent et se délitent. Une réflexion très contemporaine, qui résonne particulièrement fort dans notre époque saturée d’écrans et d’images.

Elle aborde également la question de » l’invisibilité » des femmes avec l’âge : à 25 ans, elles captivent les regards ; à 50 ans, elles n’existent plus. Dans ce monde numérique, elles peuvent redevenir jeunes, séduisantes, désirables — ou du moins en avoir l’illusion.

L’intrigue est habile, le suspense maintenu jusqu’au bout. On s’interroge, on doute, on se laisse prendre au piège du récit — tout comme Claire. Seul bémol : la pièce, annoncée à 1h30, dure finalement 1h45. Sa durée devrait être réduite pour les représentations au Festival Off, au Théâtre Arthéphile à 13h30.

JDM

 

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