Spectacle de la compagnie Artistic Scenic (75), vu le 17 juillet à 19 h 05 au Théâtre le Petit Chien dans le cadre du Festival Off d’Avignon
- Auteur : Vanessa Aiffe-Ceccaldi
- Mise en scène : Régis Romele
- Interprétation : Vanessa Aiffe-Ceccaldi
- Lumière : Dimitri Borget
- Type de public : Tout public à partir de 12 ans
- Genre : Seul-en-scène
- Durée : 1 h 10
Une chaise. C’est tout ce qu’il y a sur scène. Une chaise, et Vanessa Aiffe-Ceccaldi, seule, face à nous, dans un seul-en-scène bouleversant. Dès les premières minutes, on est happé. Avec une grande sincérité, elle incarne Thelma, une femme qui tente de comprendre ce qui a brisé son enfance. On croit d’abord assister à l’histoire d’un secret de famille : à 11 ans, Thelma découvre que celui qu’elle appelait « papa » n’est pas son père biologique. La révélation est violente, et d’autant plus difficile à encaisser qu’elle grandit auprès d’une mère absente, maladroite, à côté de la plaque. On s’attend alors à suivre le récit d’un effondrement intime.
Mais le spectacle monte en puissance, insidieusement. Car peu à peu, au fil des souvenirs et des personnages qu’elle convoque, on comprend qu’il y a autre chose. Quelque chose d’enfoui. De plus profond. Un jeu de cache-cache joué avec son frère, qui prend un autre sens, qui fait basculer le récit. Et c’est là toute la force de ce spectacle : cette lente révélation, cette tension grandissante, qui nous mène vers l’indicible. Le texte, écrit avec délicatesse et parfois même avec humour, alterne entre la tendresse, la douleur, la légèreté apparente. Vanessa Aiffe-Ceccaldi incarne à elle seule tous les visages de son passé : la grand-mère aimante, figure lumineuse et mélomane, le professeur de théâtre bienveillant, la mère en fuite, les hommes, les silences. Sans jamais surjouer, elle laisse affleurer les émotions. Tout est contenu, précis, vibrant. La mise en scène épouse cette simplicité, tout comme le travail de lumière sobre,. Rien ne détourne du récit. Tout est là pour l’amplifier.
Au-delà de son aspect autobiographique, Cache-cache interroge avec finesse la compulsion de répétition, ce besoin inconscient de revivre ce qui nous a blessés, comme une tentative de comprendre, de réparer, ou au moins de survivre. C’est une pièce sur la mémoire, sur les silences qui rongent, sur la possibilité, aussi, de se reconstruire par l’art. Vanessa Aiffe-Ceccaldi, dans une performance d’une rare justesse, nous offre un spectacle intime et universel à la fois. Parce que parfois, il suffit d’une chaise, d’un corps, d’une voix. Et l’émotion jaillit. Brutale. Belle. Indélébile.
Claire Thomas