Spectacle de la Compagnie MARZAL (75), vu le mercredi 09 juillet au Théâtre Tremplin à 15h00, dans le cadre du Festival d’Avignon 2025.
- Mise en scène : Marwan Zalloum
- Avec : Michael Asmar, Tracy Bedran, Antoine Grenier, Hicham Hamdaoui, Marwan Zalloum
- Coordination : Marra Saadé
- Genre : Théâtre contemporain
- Type de public : Tout public à partir de 7 ans
Je suis le témoin immortel d’une ville qui refuse de mourir.
De 1860 à aujourd’hui, Beyrouth, ville fatale raconte la grandeur perdue d’une ville qui a subi guerre et colonisation sous le silence total du reste du monde.
Le narrateur est un vampire. En 2024, il décide de mettre fin à ses – très nombreux – jours. Tout est organisé. Avec l’aide de son homme à tout faire, Olivier, il organise son propre assassinat. Il a hâte d’être délivré de cette souffrance éternelle. Mais avant ça, il a quelque chose de très important à faire. Avant de mourir, il doit raconter. Raconter l’histoire d’une ville qu’il a aimée, une ville pour laquelle il n’a pu qu’assister, impuissant, à sa destruction.
A travers ses souvenirs, le spectateur est transporté sur le port de Beyrouth, dans ses bars où l’on ne peut qu’être émerveillés par l’envoûtante Maya, la chanteuse. Il nous raconte les évènements tragiques qui ont secoué la ville les uns après les autres ; la pression de l’empire ottoman, la guerre civile, et finalement les explosions qui ont détruit le port et qui ont fait que ce vampire sédentaire a décidé de partir s’installer à Paris.
La lumière tamisée et l’ambiance intimiste de la salle offrent une proximité touchante entre le narrateur et les spectateurs. Lui, il raconte son histoire. Nous, on écoute dans un silence révérencieux. Parfois, on rit de ces personnages hauts en couleurs qui ont marqués sa vie. Parfois, on pleure pour cette ville déchue, pourtant encore si merveilleuse dans ses souvenirs.
Les scènes sont entrecoupées de doux moments musicaux. Les notes de l’oud résonnent dans la salle, accompagnées par les voix des comédiens. Les sonorités traditionnelles libanaises enveloppent le public. En fermant les yeux, on se retrouve au Liban. On entend le clapotis de l’eau depuis le ponton du port de Beyrouth dans la fraîcheur du soir. La ville est belle, vivante, elle brille de couleurs chatoyantes et de rires. Et nous aussi, on voudrait ne jamais avoir à la quitter.
Le texte, porté par des comédiens talentueux, est poignant de sincérité, et l’amour de l’auteur pour cette ville, qu’il partage ici aux spectateurs, est presque tangible. C’est la question même de l’identité libanaise qui est posée ici. Les habitants de la ville passent d’une influence ottomane à française, tout en essayant de garder leur identité unique.
On ouvre enfin les yeux sur une réalité trop souvent oubliée, une histoire que l’on ne raconte pas assez. Beyrouth, ville fatale, nous offre la vérité.
Marceline WEGROWE